Réminiscence post-mortem.



Ce récit commence par son accomplissement. Il commence par son ultime finalité. Il ne pouvait en être autrement. C'était la fin. Je ne me souviens plus de ce qui m'a poussé, ce matin d'Octobre à me jeter du dixième étage. Peut-être ai-je préférer l'amnésier. Oui, c'est sûrement cela. Quelque chose de profondément déplaisant devait envahir mon existence. Je ne saurai le dire. Je ne sais plus rien. Même le souvenir de la pluie qui fouettait mon visage déjà humide se floute. Je ne sais plus rien, comme je vous l'ai dit, parce que, à l'heure actuelle, il semblerait que je sois mort.
Du moins, je l'imagine, je ne peux que l'imaginer. C'est la seule chose qui me reste : l'imaginaire. Je suis une main sortie du néant. Un observateur vide. Je n'ai plus la moindre contenance. Je m'évertue à désapprendre tout ce que j'ai, au prix de ma vie semblerait-il, dû assimiler. Je ne sais plus Amour. Je ne sais plus Amitié. Je ne sais même plus "je". J'aurai pu être ambassadeur, ou clochard ivrogne, je réalise maintenant que l'au-delà aurait eu ce même goût de rien. Je ne sais que la Peur qui  me meurtrissait avant de... Avant de quoi? Je ne sais plus.
Les sonorités ont un goût suave. Les caresses galvanisent mes narines de l'odeur d'une fleur que j'aurai aimée avant. Un goût de prune me rappelle la beauté d'une muse que j'aurai pu aimée par le passé. La synesthésie ? Ma réalité. Mes sens fusionne pour donner naissance à une seule et unique perception translucide. Les informations sont toutes traitées en un point, le même, et tout devient clair. Il n'y a plus d'inconscient, je vous l'ai dit ; je ne sais plus. Ma diaprée éternelle me laisse entrevoir une tierce réalité. Et je pense pouvoir dire sans trop m'avancer que, cette-fois ci, c'est la bonne. Observateur impartial de votre perdition matérielle. Je suis asservi, je pense. Qu'est ce que c'est ? Cela serre l'abdomen. Mon flanc existe. Juste ciel, mes vices emmêlent mes viscères. Entends tu mes supplications, toi qui me tiens captifs ? Je ne suis plus vivant, la souffrance physique doit cesser je t'en pr...

TRANSMET TA CONSCIENCE.

Quoi ?

TRAVESTI L'INNOCENCE.

Serait-ce le malin ?

TRANSMET TA CONSCIENCE.

L'image d'une jeune femme. C'est un songe. Oui c'est un songe. Elle n'est pas réellement belle, mais ses traits sont doux. Elle a l'air heureuse. Je m'approche d'elle. C'est un songe. Je m'approche, je suis à présent, si prés, tellement prés... C'est un songe... Je la touche à présent... Elle ne semble pas me remarquer... Je l'embrasse. C'est un songe.

Une violente bouffée d'air gonfle mes poumons. Tout semble si réel soudainement. J'ai cru sentir quelque chose sur ma bouche. Qui suis-je ? Je m'approche du miroir. Je suis Sandrine. Pourquoi ce sentiment de vertige ? Pourquoi ai-je l'impression de n'être Sandrine que depuis quelques secondes ? Tout est en place. Tout est là ou tout devrait être. Je suis infirmière, célibataire, mon père est dentiste, ma mère assistante dentaire, je joue de la guitare accoustique et j'aime l'odeur du lilas. J'aime... l'odeur... du... LILAS ! Non. Je ne l'aime pas. Ou si. Je ne sais plus. Reprenons ; je travaille en maison de retraite, j'ai 27 ans, peu d'amis, et j'aime l'odeur du lilas. Non, je n'ai pas pu avoir aimé l'odeur du lilas. Mon dieu je deviens folle. J'aime l'odeur du jasmin. Ma commode le démontre... Tu vois Sandrine ? Parfum au jasmin, encore, encore, encore.
J'aime l'odeur du jas...Lilas...
Je m'appelle Sandrine et j'aime l'odeur du lilas, mais ce n'était pas le cas il y a trois minutes, je m'appelle Sandrine, j'habite au dixième étage. J'ai eu mon appartement au rabais. L'ancien propriétaire s'était jeté par la fenêtre.
Je m'appelle Sandrine, et aujourd'hui, je vais me suicider. Par amour pour le Jasmin. Ou peut-être le Lilas.


01/06/2010
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