La réécriture du corbeau psychothérapeute.

 

 

Alors que j'aspirais méthodiquement des bouffées d'agonies sur une cigarette fraîchement allumées dans ma chambre glaciale, assise par terre au milieu de ce qui apparaissait dans la pénombre êtres des agglomérats de matière sombre formés par des livres et des vêtements négligement jetés au sol, alors que je songeais avec lenteur à la quiétude qui m'envahissait, un grincement, un grincement à peine audible, si peu audible que longtemps j'ai pensé l'avoir imaginé vint troubler mon esprit. Je me relevais avec difficulté. Ma cigarette qui balancait comme un pendu tout juste élancé entre mon index et mon majeur fébrile semblait être le seul signe de la légére panique qui me gagnait à l'entente de ce son profond et aigu.

 

"Il y a quelqu'un ?"

 

Pas un bruit. Non, ce n'était pas juste l'absence de bruit. C'était la présence du silence. Un silence froid, pénétrant, qui ne semblait pas se contenter de l'espace de ma chambre. Non, à cet instant j'étais convaincue que tout l'univers était baigné d'un silence absolu. Ce silence fut amplifié par l'imperceptible son que je distingua une seconde fois. Ce même grincement. J'étais sûre que quelque chose avait grincé cette fois.

 

"Il y a quelqu'un ?!"

 

Je n'attendis plus de réponse, je me précipitais vers la porte fenêtre qui me faisais face. Je l'ouvris d'un geste hésitant pour comtempler ce qui dans l'extérieur pouvait être à l'origine de ce bruit qui me troublait tant, quand soudain une masse sombre et lisse qui passa avec célérité au dessus de mon crâne me fit perdre l'équilibre. J'hurlais de surprise... Puis soupirait de soulagement. L'immonde bête était à l'origine de cette terreur, elle était infondée. Tant mieux. Je relevais ma carcasse encore douloureuse de la chute récente, et accompagnait d'un mouvement de bras qui se voulais effrayant un "Ouste!" qui manquait foutrement de conviction.

 

La bête, dont je supposais qu'il s'agissait d'un volatile, s'étais logée au sommet de ma bibliothéque. La bête, dont je supposais qu'il s'agissait d'une insolente, ne fit pas le moindre mouvement en réaction à mes sommations despérées. La bête, dont je supposais qu'elle était sauvage, projettais l'ombre la plus lisse que je n'avais jamais vu ; j'aurai même juré que celle ci dégagait une odeur de parfum féminin à la mode. La bête, dont je supposais qu'elle était  peu loquace en raison de sa condition animale, se mit à me parler.

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

"V-v-veuillez m'excuser... Qu'est ce que vous êtes au juste ?"

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

"Je ne saisi pas... Pourquoi m'apparaissaît vous si soudaiment, si fortuitement... Pourquoi ?"

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

"Pourquoi cette question réccurente ? Pourquoi venez vous troublez mon pourtant si paisible repos pour... Pour rien, en réalité, vous n'avez rien à faire là, quoique vous fassiez ou compter faire en cette demeure, il est tard... Je souhaitais retrouver ma quiétude depuis si longtemps perdue. Cessez de m'importunez, je vous en conjure."

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

Il devenait clair que la bête qui surplombais mon armoire n'était pas mon amie. Il devenait clair que celle ci semblait prendre un plaisir pervers à trombler la tranquillité des honnêtes gens. Il devenait clair que cette chose devait être chassée par la force et non par le dialogue. Je me saisi du plus lourd ouvrage à ma disposition immédiate et l'envoya avec force et violence dans la direction de l'animal. Ledit animal fit un pas de côté, évita avec justesse et précision la trajectoire du livre qui s'écrase pitoyablement à ses côtés. Imperturbable, il reprit :

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

"Mais on ne mange pas, bête diabolique, on ne mange pas ! Il est trois heure du matin, personne ne mange à trois heure du matin, m'entend tu ? Personne ! Quelque frustre atteint d'hyperphagie, s'il en est, et encore. On ne mange pas !"

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

Je me décidais alors à accorder à la bête ce qu'elle souhaitais en échange de ma solitude si vivement désirée. Je ramassais un paquet de biscuit à mes pied, en sorti trois, et lui les lanca un par un. Elle semblait imperturbable. Les biscuits qui atteignait leur cible s'écrasait tristement à ses pieds sans soulever le moins du monde l'attention du volatile. Ils s'empilaient bêtement et rien de plus. Alors, la bête repris, de ce même ton qui semblait me faire peu à peu perdre l'esprit...

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

Soudain, je compris. Ce n'était pas à elle que s'adressait cette requête, mais à moi. J'avalais le paquet de gateau rance dans son intégralité, avec gloutonnerie et vitesse, je ne machais plus. J'avalais. Quand j'eus finis, mon ventre me sembla si lourd que je fus contraint à tomber, vaincu, en avant, sur mes genoux, sur le sol froid, sur la terre indigne. Je tournis alors mes deux yeux implorants et embués vers l'animal, convaincu que celui ci me contemplait du coin de l'oeil à travers l'obscurité, attendant son départ, quand celui-ci me dit...

 

"Quand est-ce qu'on mange ?"

 

"Je ne veux plus manger, oh non, immonde bête. Ne comprends tu pas, ma chimère ? Je ne veux plus d'une existence alimentaire. Je veux toucher autre chose, quelque chose que personne ne semble vouloir toucher, ce que les anciens appellent le bonheur. Pourquoi me sommez vous donc tous de remplir ma panse ? Je recherche quelque chose de plus beau, de plus grand. En mourrai-je de faim, pensez-vous ? Pourquoi m'empêchez vous de souhaiter l'inutile ? Et si ce dont j'avais besoin était de remplir sommairement mon assiette pour me complaire dans un autre chose qui vous échappe ? Non, il ne vous échappe pas. Vous refusez de le voir. Je n'appartiens pas à la nouriture, je ne vous appartiens pas. J'appartiens à mon dessein... Je refuse d'appartenir à l'alimentaire, vous pouvez vous foutre vos surgelés Picard et vos cordons bleus pére dodu au cul, vous entendez ?"

 

"Quand est ce qu'on mange ?"

 

Toute ressemblances avec une oeuvre remarquable de la littérature fantastique serait... purement fortuite.



27/04/2011
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